laulaublog

J' ai beau faire, je tourne en rond, il faut que j'en parle de cette "décision "irresponsable de Sarkozy, voulant faire porter à un enfant le poids d'un enfant mort gazé dans les camps, qu'il connaitrait nominalement. Haut le coeur, écoeurement, stupéfaction. Heureusement madame Simone Veil s'insurge: trop, c'est trop !

Car c'est à se demander si Sarkozy apparemment sensibilisé à ce devoir de mémoire (qui existe déjà sans lui, dans les livres de classe, et par les interventions des instituteurs, enfin, par des téléfilms ou films de qualité que l'on voit sur l'A2 et la 3, chaines en péril), c'est à se demander s'il a lu un ou deux livres concernant la shoah, et comment il en est ressorti. Parce que moi, adulte, qui ai lu beaucoup de livres sur la shoah, il m'a fallu plusieurs fois reposer le livre tant l'horreur était absolue, et  continuer, en essayant de retenir les affects terribles que je ressentais.

Un peu d'histoire personnelle, mais il s'agit bien d'individus, et d'enfants, alors je vous raconte ce que j'ai ressenti, mon parcours sur ce sujet.

A 13 ans, mon père m'envoie voir au ciné-club du lycée "Nuit et brouillard" de Resnais. je vous avouerai que je n'ai pas tout compris, tant cela dépassait l'imagination. Mon père m'explique, j'ai du mal toujours à comprendre.

A 15 ans, il me fait lire "Treblinka": là, je comprends et c'est terrible. Je découvre un monde de folie, je découvre jusqu'où peut aller la cruauté humaine et le désastre historique. Car il ne suffit pas de porter l'horreur, il faut  comprendre comment et pourquoi elle émerge. En admettant que cela puisse s'expliquer... Voici ce qui manquera à ces enfants qui porteront un poids de cauchemar insensé que même des adultes en bonne santé ont du mal à supporter. Certes les enfants d'aujourd'hui sont davantage sensibilisés à l'espace historique et contemporain. Mais on ne peut leur laisser que des affects sans leur permettre de comprendre l'ascension de la barbarie, ses conditions de possibilités.

Puis je découvre par hasard ce qu'est le pétainisme. Et je tombe de haut. les français ont collaboré, d'une manière insigne. Je découvre cela, nous sommes sous la présidence de DE gaule et on ne parle que de résistance. Mais on nous cache alors le paitinisme. J' encourage ici à lire à ce propos un livre d'Henri Rousso, normalien, qui montre pourquoi Vichy a été refoulé dans l'histoire: "le syndrôme de Vichy" point seuil.

Je découvre rafles, dénonciations, collaborations etc..Je découvre qu'on m'a en quelque sorte menti, par omission. Il faudra la repentance de Chirac, après le procès de Papon qui fut une farce sinistre pour que je sois enfin un peu apaisée, un peu seulement. cela ne me suffit pas, non.

 Cette découverte , cette désillusion est sans doute ce qui me fera militer en 1968 avant tout.

Mais je continue à lire des livres sur la shoah : la poésie magnifique le mot n'est pas le bon, une tentative d'écrire autour des camps de Paul Celan, suicidé, "l'espèce humaine" de Robert Antelme -le mari de Duras, que l'on retrouve dans" la douleur "où elle raconte Robert Antelme revenant des camps. "Si c'est un homme de Primo levi" - qui s'est suicidé aussi. Robert Antelme et Primo Levi dans la description de leur situation horrible disent "je": de telle sorte que l'on s'identifie au personnage et que l'on vit avec eux ce calvaire. Et là encore plus on repose le livre, on respire, pour repartir, pour lire encore et encore la cruauté des bourreaux, leurs initiatives folles, la folie de la destruction d'un homme par une autre homme, des hommes par d'autres hommes et le raffinement dans la cruauté.

Et vous voudriez que des enfants s'identifient à cela ?

C'est pure folie, pure négation de leur capacité psychologique, et c'est bien peu anticiper sur les dérives que cela peut donner (culpabilité atroce et peut-être qui sait identification aux bourreaux. Je ne suis pas psychologue, mais j'imagine que cela pourrait exister, sachant qu'un livre sans équivoque traite cependant de ce sujet)

Oui, insoutenables ces livres, pour qui  a de la sensibilité et une empathie normale.

Ensuite j'ai vu et revu le long Shoah de Claude Lanzmann, j'ai vu le film de Spielberg "La liste Schindler"

Il faudrait au moins que ces enfants  dans les cauchemars que vous leur promettez aient au moins les moyens de comprendre EN PROFONDEUR pourquoi c'est arrivé, quelles ont été les conditions historiques pour que la plus grande des barbaries puisse émerger.

L'histoire, ce n'est pas un claquement des doigts pour la faire marcher, comme vous avez si bien l'habitude de le faire dans vos décisions égotiques, autoritaristes, indignes d'un chef d'état.(voir la pétition pour une vraie démocratie) l'histoire, c'est complexe, ça demande de l'analyse, beaucoup de réflexion ce n'est  pas un coup de communication d'homme politique.

Pour finir sur cette triste affaire, il y a un livre que je n'arrive pas encore à lire. Il m'a été dédicacé à la fête du livre de Toulon, celle qui avait été organisé contre la fête FN qui se tenait du temps où l'extrême droite était à la mairie de Toulon. Le vieux monsieur qui me l'a dédicacé a fait partie de la révolte du camp de Sachso. Sur le livre il y a le visage d'un homme squelettique. Je sais -en partie- ce que cet homme que j'ai vu là, venu pour défendre ce que les lepénistes niaient alors, a connu l'enfer.

Et j'ai encore plus de mal à ouvrir le livre. Un jour, bien sûr, je me le suis promis..

Alors, vous faites bien peu cas de la sensibilité des enfants. La mémoire de cette barbarie, ça s'apprend, c'est très lourd pour tous ceux qui ont une famille entière décimée dans les camps, c'est très lourd aussi pour ceux qui n'en ont pas mais qui ne veulent pas que cette barbarie revienne.

Il y a d'autres moyens de continuer le devoir de continuer le devoir de mémoire, déjà assuré par les enseignants, à qui vous faites offense, d'autres moyens auprès des enfants.

Et puis leur programme c'est aussi la révolution française, sa devise: liberté, égalité, fraternité.

Méditez là bien. On aimerait vous la voir appliquer.

Parce que quand j'ai entendu Le Pen sourire après votre intervention à Toulon pendant la campagne où les arabes étaient les boucs-émissaires, et le Pen de dire "il reprend mes thèses" oui, quand j'ai entendu tout ça, quand je vous ai entendu parler, je me suis posée quelques questions..

Les rafles, les dénonciations, les lois répressives au nom du bien et du Saint-Esprit, l'ADN pour le regroupement des familles, les lois génétiques pour expliquer ça et ça, ça ne vous rappelle pas quelque chose ? Les  gens qui cachent les sans-papiers qui, revenant dans leur pays risquent d'être tués, au risque de 5 ans de prison, ça ne vous rappelle pas quelque chose ?

Moi, si...

Bien entendu, nous ne sommes pas dans la barbarie absolue de la shoah. Mais bien des méthodes semblent indignes d'une France qui fut pétainiste, d'une France censée défendre les droits de l'homme...Et que l'on ne m'invoque pas à tous propos "le 11 Septembre". Le Chili ? L'Argentine ? Vous vous souvenez ? Les morts, les tortures dans les stades au nom des U.S. et de la C.I.A...Alors, ne tombons pas dans" le piège 11 septembre", non. Dénonçons la barbarie partout où elle est. Partout où l'on voit la naître, chez les terroristes aussi bien sûr.

Laulau