laulaublog

REUSSITE du premier meeting de François Hollande avec Libération

Hollande entre en pistes au Bourget

Pour son premier meeting de campagne, hier devant 20 000 personnes, le candidat socialiste a navigué entre annonces de mesures et anecdotes personnelles.

1 commentaire

Par Laure Bretton et Mathieu écoiffier Photo Sébastien Calvet

François Hollande hier au Bourget. (Photo Sébastien Calvet)
Je m'abonne

Téléchargez Libé sur web, iPhone, iPad, Android
1€ seulement jusqu'à la fin du mois

Au Bourget, premier grand meeting de sa campagne, on l’attendait au tournant présidentiel. Pour passer cette épreuve de vérité, François Hollande a fini par livrer son «secret» : «J’aime les gens, quand d’autres sont fascinés par l’argent.»

Pendant une heure et vingt-cinq minutes, le ton est donné. Un discours très à gauche - mais une gauche réaliste et productiviste -, avec un seul ennemi. «Mon véritable adversaire, il n’a pas de nom, pas de visage, pas de parti. Il ne présentera jamais sa candidature et pourtant il gouverne, lance le candidat socialiste à l’Elysée devant près de 20 000 militants et sympathisants galvanisés. Cet adversaire, c’est le monde de la finance.» Et ses affidés, ceux qui «s’enrichissent en dormant et pas en travaillant», qu’il cogne et s’apprête à taxer sans ménagement.

«Je serai le président de la fin des privilèges», promet le député de Corrèze, qui ne cite pas une seule fois le nom de Nicolas Sarkozy. Mais son autoportrait en président de la République est un réquisitoire implacable contre celui qu’il nomme d’ordinaire «le candidat sortant». Quand on s’appelle François Hollande et qu’on se prépare depuis trente ans - «un bail !» reconnaît-il - à «présider la République», la fonction suprême c’est «se montrer digne partout dans tous les actes qu’exige la fonction présidentielle»,«faire respecter les lois pour tous sans faveur pour les proches»,«ne pas nommer les présidents de chaînes de télévision et de radio» et «être viscéralement attaché à la laïcité», et donc inscrire la loi de 1905 de séparation de l’Eglise et de l’Etat dans la Constitution. Bref, tout le contraire du chef de l’Etat.

Pas de violon. François Hollande a une boussole : le clivage droite-gauche. Classique mais efficace. Il revient aux fondamentaux : après avoir inquiété certains, qui le voyaient jouer trop centriste pour emporter le second tour, il se concentre sur le premier en rassemblant son camp. Derrière une gauche certes redistributive et juste - réforme bancaire en urgence, réforme fiscale rapidement, encadrement des loyers, création de logements sociaux (lire page 4) -, mais aussi ferme et patriote, avec drapeau tricolore et Marseillaise. Avec François Hollande, l’heure n’est plus à la permissivité soixante-huitarde. «Les délinquants financiers et les petits caïds, je les avertis : ceux qui ont pu croire que le droit ne les concernait pas, le prochain président vous le dit, la République vous rattrapera», tonne-t-il avant d’annoncer la création de «zones de sécurité prioritaires». Sur le pouvoir d’achat et l’impératif écologique, le candidat apparaît moins battant.

Seul en scène, les sourcils froncés et la voix un peu éraillée, François Hollande essaie de dire qui il est et quel président il sera. Depuis une semaine, son entourage annonçait un discours très personnel mais l’intéressé ne sort pas les violons. «C’est vrai que je ne m’exhibe pas, je reste moi-même, c’est ma force. Ce que vous voyez ici, c’est ce que je suis», énonce-t-il. Avant une fois de plus de viser Sarkozy et son discours d’entrée en campagne de janvier 2007.

«Je n’ai pas besoin de changer en permanence pour être moi-même», lâche le socialiste. Rompant avec ses onze années de discours de premier secrétaire du PS où il biffait toute allusion intime, le candidat ralentit le débit pour évoquer sa famille «plutôt conservatrice» de Normandie. Chose inédite, il évoque à la tribune son père (qui fut candidat aux municipales à Rouen sur une liste de droite ultra), mais qui lui a accordé «la liberté de choisir» son engagement. Et surtout «l’âme généreuse» de sa mère, qui lui a «transmis ce qui est plus beau, l’ambition d’être utile».

Elle était une mitterrandiste de la première heure, mais son modèle à lui, c’est Pierre Mendès-France, héraut de la social-démocratie qui disait que «la vérité doit forcément guider nos pas». Hollande embraie : «Je vous dis la vérité, je connais la gravité de notre situation. Je ne promettrai que ce que je suis capable de tenir.» «L’homme politique s’efface peu à peu devant l’homme d’Etat», s’enflamme le sénateur André Vallini.

«Ferveur raisonnée». Au nom du réalisme, il confirme que les 60 000 postes dans l’Education nationale se feront à nombre de fonctionnaires constant, que toute nouvelle dépense sera financée par une réduction budgétaire ailleurs et, par exemple, qu’il n’y aura que 150 000 «emplois d’avenir» pour les jeunes, soit moitié moins que dans le projet du PS. Et pourtant, la salle applaudit debout. L’heure est à la «ferveur raisonnée», note le dircom du candidat, Manuel Valls. Mais l’objectif semble atteint pour le favori des sondages. Même la gauche du PS, qui a donné de la voix cette semaine, ne tousse pas trop fort. «A un moment, on a cru qu’il n’y aurait même plus d’emplois d’avenir», glisse Benoît Hamon.

Etre au point d’équilibre entre le «rêve français» et les contraintes économiques, c’est une position naturelle pour Hollande. Qui se révèle en revanche moins à l’aise dans les passages obligés sur l’histoire de France, lorsqu’il évoque l’Occupation et explique que les résistants n’étaient pas motivés par «les bonus et les stock-options». Drôle de raccourci. Mais peu importe : l’objectif semble atteint. «Les Français savent qu’il peut battre Sarkozy mais voulaient savoir s’il peut relever le pays. L’inquiétude est levée», trompette Olivier Faure, un de ses stratèges. Hollande peut conclure sous les vivats : «La justice, c’est maintenant ! L’espérance, c’est maintenant ! […] Dans trois mois, nous ferons gagner la gauche, avancer la France ! Le changement, j’y suis prêt !»



23/01/2012
0 Poster un commentaire
Ces blogs de Politique & Société pourraient vous intéresser

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 8 autres membres