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Pourquoi le projet ULCOS ne sauvera pas Florange.(article Mediapart)

Pourquoi le projet «Ulcos» ne sauvera pas Florange

Lorsqu'il s'est exprimé vendredi sur l'avenir de Florange, Jean-Marc Ayrault n'avait qu'un sigle à la bouche : « Ulcos », du nom de ce programme de captation et de stockage du CO2, présenté comme la clé du sauvetage des deux hauts-fourneaux du site lorrain. « Un projet d'excellence industrielle et d'excellence environnementale », s'est enthousiasmé le premier ministre, qui en a même fait le symbole de sa politique industrielle : « Ma conception du rôle de l'État est qu'il doit animer, impulser, réguler l'activité économique et protéger les intérêts stratégiques. C'est pourquoi il doit investir lui-même dans les projets d'avenir qui ne sont pas immédiatement rentables. C'est l'exemple d'Ulcos. »

Ulcos peut-il vraiment sauver Florange ? Parce qu’il doit permettre de réduire les émissions de CO2 dans l’industrie sidérurgique, ce projet de recherche trouve ses défenseurs parmi les experts en transition énergétique et en finance carbone. Mais même eux ne croient pas à une relance du site mosellan par la seule magie d’Ulcos.

« Ulcos ne peut être qu’un supplément d’âme, avec du sens et pouvant déclencher un effet d’entraînement important en Europe, mais il ne peut être à lui seul toute la solution », analyse Emmanuel Guérin de l’Iddri. « Cette technique peut s’ajouter aux solutions industrielles sur le site, mais il faut que tout le reste aille bien. » Peu ou prou le même diagnostic que Guy Dollé, l’ancien PDG d’Arcelor interrogé par Les Échos : « Faire croire qu'Ulcos va sauver les hauts-fourneaux lorrains, c'est de la tromperie. Cela donne une année environ d'expérimentation sur un haut-fourneau et non sur les deux compte tenu des investissements à réaliser. »

Pourquoi ? Parce que le marché européen du carbone est aujourd’hui en pleine déroute. Or il doit contribuer au financement du projet – il coûte plus de 600 millions d’euros –, mais aussi à sa rentabilisation : les émissions de gaz carbonique évitées sont censées être vendues comme quotas et générer des recettes. Or, si le cours du carbone reste bas, l'entreprise ne sera pas incitée à réduire ses émissions. Quel intérêt aurait-elle à engager de lourds investissements, pour de si faibles perspectives de rentrées d'argent ?

Fin novembre, le permis européen ne valait plus qu'environ 7 euros la tonne, alors qu’il en représentait encore 17 euros en mai 2011. Un montant ridiculement bas du fait de la surallocation de quotas – il y a plus de tonnes de dioxyde de carbone disponibles que d’acheteurs – et de la crise économique, qui, en ralentissant l’activité, réduit mécaniquement les rejets de gaz à effet de serre. Au point que certains analystes s’interrogent sur le devenir de la finance carbone. « Les prévisions du prix du carbone à l’horizon 2020 sont très basses, autour de 15 ou 20 euros la tonne, explique Emmanuel Guérin. De ce fait, on ne peut pas attendre que les activités de captation et de stockage du carbone sur les sites industriels soient rentables à très court terme. »

Pour que l’activité reprenne sur le marché du CO2, il faudrait que les industries soumises au système des quotas (ciment, acier, verre, papier…) en acceptent les règles et jouent le jeu. Il y a deux façons d’y parvenir, selon le chercheur. Que l’Europe leur montre qu’elle s’engage financièrement dans la recherche sur les technologies décarbonées. Ulcos peut en être un bon exemple et entraîner des effets vertueux. Mais aussi, qu’elle leur démontre que les industries des États en dehors du protocole de Kyoto (États-Unis, pays émergents) livrent un effet comparable. Ulcos ne changera rien à ce problème

Pourquoi le projet «Ulcos» ne sauvera pas Florange

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Ulcos peut-il vraiment sauver Florange ? Parce qu’il doit permettre de réduire les émissions de CO2 dans l’industrie sidérurgique, ce projet de recherche trouve ses défenseurs parmi les experts en transition énergétique et en finance carbone. Mais même eux ne croient pas à une relance du site mosellan par la seule magie d’Ulcos.

« Ulcos ne peut être qu’un supplément d’âme, avec du sens et pouvant déclencher un effet d’entraînement important en Europe, mais il ne peut être à lui seul toute la solution », analyse Emmanuel Guérin de l’Iddri. « Cette technique peut s’ajouter aux solutions industrielles sur le site, mais il faut que tout le reste aille bien. » Peu ou prou le même diagnostic que Guy Dollé, l’ancien PDG d’Arcelor interrogé par Les Échos : « Faire croire qu'Ulcos va sauver les hauts-fourneaux lorrains, c'est de la tromperie. Cela donne une année environ d'expérimentation sur un haut-fourneau et non sur les deux compte tenu des investissements à réaliser. »

Pourquoi ? Parce que le marché européen du carbone est aujourd’hui en pleine déroute. Or il doit contribuer au financement du projet – il coûte plus de 600 millions d’euros –, mais aussi à sa rentabilisation : les émissions de gaz carbonique évitées sont censées être vendues comme quotas et générer des recettes. Or, si le cours du carbone reste bas, l'entreprise ne sera pas incitée à réduire ses émissions. Quel intérêt aurait-elle à engager de lourds investissements, pour de si faibles perspectives de rentrées d'argent ?

Fin novembre, le permis européen ne valait plus qu'environ 7 euros la tonne, alors qu’il en représentait encore 17 euros en mai 2011. Un montant ridiculement bas du fait de la surallocation de quotas – il y a plus de tonnes de dioxyde de carbone disponibles que d’acheteurs – et de la crise économique, qui, en ralentissant l’activité, réduit mécaniquement les rejets de gaz à effet de serre. Au point que certains analystes s’interrogent sur le devenir de la finance carbone. « Les prévisions du prix du carbone à l’horizon 2020 sont très basses, autour de 15 ou 20 euros la tonne, explique Emmanuel Guérin. De ce fait, on ne peut pas attendre que les activités de captation et de stockage du carbone sur les sites industriels soient rentables à très court terme. »

Pour que l’activité reprenne sur le marché du CO2, il faudrait que les industries soumises au système des quotas (ciment, acier, verre, papier…) en acceptent les règles et jouent le jeu. Il y a deux façons d’y parvenir, selon le chercheur. Que l’Europe leur montre qu’elle s’engage financièrement dans la recherche sur les technologies décarbonées. Ulcos peut en être un bon exemple et entraîner des effets vertueux. Mais aussi, qu’elle leur démontre que les industries des États en dehors du protocole de Kyoto (États-Unis, pays émergents) livrent un effet comparable. Ulcos ne changera rien à ce problème

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Ulcos peut-il vraiment sauver Florange ? Parce qu’il doit permettre de réduire les émissions de CO2 dans l’industrie sidérurgique, ce projet de recherche trouve ses défenseurs parmi les experts en transition énergétique et en finance carbone. Mais même eux ne croient pas à une relance du site mosellan par la seule magie d’Ulcos.

« Ulcos ne peut être qu’un supplément d’âme, avec du sens et pouvant déclencher un effet d’entraînement important en Europe, mais il ne peut être à lui seul toute la solution », analyse Emmanuel Guérin de l’Iddri. « Cette technique peut s’ajouter aux solutions industrielles sur le site, mais il faut que tout le reste aille bien. » Peu ou prou le même diagnostic que Guy Dollé, l’ancien PDG d’Arcelor interrogé par Les Échos : « Faire croire qu'Ulcos va sauver les hauts-fourneaux lorrains, c'est de la tromperie. Cela donne une année environ d'expérimentation sur un haut-fourneau et non sur les deux compte tenu des investissements à réaliser. »

Pourquoi ? Parce que le marché européen du carbone est aujourd’hui en pleine déroute. Or il doit contribuer au financement du projet – il coûte plus de 600 millions d’euros –, mais aussi à sa rentabilisation : les émissions de gaz carbonique évitées sont censées être vendues comme quotas et générer des recettes. Or, si le cours du carbone reste bas, l'entreprise ne sera pas incitée à réduire ses émissions. Quel intérêt aurait-elle à engager de lourds investissements, pour de si faibles perspectives de rentrées d'argent ?

Fin novembre, le permis européen ne valait plus qu'environ 7 euros la tonne, alors qu’il en représentait encore 17 euros en mai 2011. Un montant ridiculement bas du fait de la surallocation de quotas – il y a plus de tonnes de dioxyde de carbone disponibles que d’acheteurs – et de la crise économique, qui, en ralentissant l’activité, réduit mécaniquement les rejets de gaz à effet de serre. Au point que certains analystes s’interrogent sur le devenir de la finance carbone. « Les prévisions du prix du carbone à l’horizon 2020 sont très basses, autour de 15 ou 20 euros la tonne, explique Emmanuel Guérin. De ce fait, on ne peut pas attendre que les activités de captation et de stockage du carbone sur les sites industriels soient rentables à très court terme. »

Pour que l’activité reprenne sur le marché du CO2, il faudrait que les industries soumises au système des quotas (ciment, acier, verre, papier…) en acceptent les règles et jouent le jeu. Il y a deux façons d’y parvenir, selon le chercheur. Que l’Europe leur montre qu’elle s’engage financièrement dans la recherche sur les technologies décarbonées. Ulcos peut en être un bon exemple et entraîner des effets vertueux. Mais aussi, qu’elle leur démontre que les industries des États en dehors du protocole de Kyoto (États-Unis, pays émergents) livrent un effet comparable. Ulcos ne changera rien à ce problème



06/12/2012
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