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LEGISLATIVES :

«Tout dépend du score du FN et de la mobilisation»

4 juin 2012 à 23:06 (Mis à jour: 5 juin 2012 à 11:33)
 

Interview Pascal Jan, vice-président du Cercle des constitutionnalistes.

Par LILIAN ALEMAGNA

Pascal Jan, président du Cercle des consitutionnalistesPascal Jan, professeur de droit public à Sciences-Po Bordeaux et vice-président du Cercle des constitutionnalistes, estime que le passage au quinquennat et l’inversion du calendrier n’empêchent pas la possibilité de cohabitation.

Existe-t-il un risque pour la gauche de perdre les législatives et d’avoir une cohabitation ?

Il y a toujours ce risque, dans la mesure où le mode de scrutin est différent de celui de la présidentielle. La droite n’a pas subi une défaite si importante le 6 mai. Objectivement, elle peut prétendre à une victoire le 17 juin. Tout dépendra de la capacité des candidats du FN à se maintenir en triangulaire et de la mobilisation à gauche.

A qui profiterait l’abstention ? On a coutume de dire qu’elle désavantage la gauche…

D’habitude, après la présidentielle, la démobilisation touche le camp du perdant. Elle serait ainsi plus favorable à la gauche. Mais une forte abstention empêcherait aussi les candidats FN de se maintenir.

Pour quelles raisons ?

Un candidat peut se maintenir au second tour s’il réalise au moins 12,5% des inscrits - et non des suffrages exprimés. Par conséquent, il faut réaliser 16, 17, voire 18% des voix pour se qualifier. Plus l’abstention est haute, plus la barre pour être au second tour l’est aussi.

Le passage au quinquennat, en 2002, et l’inversion du calendrier étaient censés empêcher toute cohabitation. Or, dix ans après, on craint toujours - ou espère, c’est selon - un tel cas de figure. Pourquoi ?

Les cohabitations de 1986, 1993 et 1997 s’étaient produites après un certain temps de majorité favorable au chef de l’Etat. Elles étaient donc politiquement gérables. Depuis 2002, une telle cohabitation serait une incohérence politique complète. Dès lors, que ferait le chef de l’Etat ? Laisserait-il faire ? Déciderait-il de dissoudre immédiatement l’Assemblée nationale pour convoquer de nouvelles législatives ? Plus tard ? Tout est ouvert.

Le quinquennat et l’inversion du calendrier n’ont donc pas atteint le but recherché…

Non. Certes, quelques semaines après la présidentielle, on ne voit pas les électeurs changer d’avis. Mais ce n’est pas impossible. De plus, la réforme de 2000 n’empêche pas le cas d’une majorité relative. Or, on oublie souvent qu’en 1988, après la victoire de Mitterrand et celle de la gauche aux législatives, Michel Rocard avait gouverné sans majorité absolue. Mais, à l’époque, en cas de blocage, le Premier ministre pouvait utiliser l’article 49-3 de la Constitution pour passer en force à l’Assemblée. Or, depuis la réforme constitutionnelle de 2008, on ne peut l’utiliser que sur les lois de finances et une fois seulement par session parlementaire pour un texte ordinaire.

Voter le même jour pour le Président et les députés serait-il alors une solution ?

C’est une des solutions possibles. On pourrait aussi imaginer le premier tour des législatives le jour du second tour de la présidentielle. Mais l’écueil des modes de scrutin différents serait toujours là ! Si on veut absolument éviter la cohabitation dans notre système politique, il faudrait, en plus d’un mode de scrutin identique, supprimer aussi le droit de dissolution et lier, quoi qu’il arrive, le mandat des députés à celui du président.

Justement, quel mode de scrutin empêcherait une cohabitation ?

Le même que la présidentielle : les deux candidats en tête au premier tour sont qualifiés pour le second.

Quitte à renforcer le bipartisme ? François Hollande a pourtant promis de la proportionnelle…

Oui. Et cela n’aidera pas à la clarté électorale. Un mode de scrutin a pour objet de dégager, en étant le plus juste possible, une majorité claire. Hollande a choisi, lui, la justice électorale. Mais l’émiettement de la majorité, les négociations entre groupes et partis n’arrangeront pas le gouvernement, dont la priorité est de disposer d’une majorité claire pour mener des politiques publiques claires.



05/06/2012
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