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Commémoration du 70 ème anniversaire de la rafle du Vél d'hiv, et responsablite de la france dans la shoah

«Un crime commis en France par la France»

22 juillet 2012 à 22:06
Le président François Hollande arrive pour la commémoration du 70e anniversaire de la rafle du Vel d'Hiv, le 22 juillet 2012 à Paris
Le président François Hollande arrive pour la commémoration du 70e anniversaire de la rafle du Vel d'Hiv, le 22 juillet 2012 à Paris (AFP)

Lors de la cérémonie d’hier, François Hollande a réaffirmé, comme Jacques Chirac avant lui, la responsabilité de l’administration française.

Par Annette Lévy-Willard

La garde républicaine qui joue la Sonnerie aux morts puis la Marseillaise, le Président de la République, le gouvernement, les autorités politiques, religieuses, militaires, les élus… c’est la France qui se recueille devant un petit monument construit au bord de la Seine, à quelques pas de l’ancien Vél d’Hiv. 13 152 Juifs, surtout des femmes et des enfants, y furent parqués sans eau ni nourriture avant d’être assassinés. Leur souvenir est revenu au fil des ans, juste avant que les rares témoins ne disparaissent.

«Trahison». Devant ce lieu qui n’existe plus, François Mitterrand était venu en 1992, en pleine polémique sur les années noires et le rôle de Vichy dans la Solution finale. Sans prendre la parole. C’est Jacques Chirac qui, en 1995, a reconnu, pour la première fois, la responsabilité de l’Etat français dans cette rafle dont la seule image reste une photo d’autobus parisiens gardés par un policier français : «La France, à ce moment-là, la France, patrie des Lumières et des droits de l’homme, terre d’accueil et d’asile, la France accomplissait l’irréparable», s’était-il écrié. Hier, François Hollande a repris et cité les phrases de l’ancien président, rajoutant avec force : «Ce crime a été commis en France par la France. Ce fut aussi un crime contre la France, une trahison de ses valeurs que la Résistance, la France libre, les Justes surent incarner dans l’honneur.» Une France enfin réconciliée avec son passé. Qui, après avoir oublié puis affronté la vérité de la collaboration, reconnaît maintenant le courage de la multitude de Français «anonymes» qui ont aidé au sauvetage des Juifs sur leur territoire.

«Abjection». Dans son discours, Hollande a aussi donné un sens nouveau au mot «trahison». Après la guerre, au cours des procès - comme celui du maréchal Pétain - et de l’épuration, le crime de trahison ne comprenait pas la collaboration ultime qu’avait été l’arrestation des Juifs par l’administration et la police françaises jusqu’en zone libre. Remettant aux nazis ces Juifs réfugiés en France, rappelle François Hollande, qui martèle : «Là se situe la trahison.» Et d’évoquer la prière chaque samedi, dans les synagogues françaises, pour «que la France vive heureuse et prospère, qu’elle soit forte et grande par l’union et la concorde». Après avoir retracé la machine de déportation, l’horreur des camps et de l’extermination, Hollande a basculé dans le présent, pour dénoncer l’antisémitisme et la xénophobie : «Il y a quatre mois, des enfants mouraient pour la même raison que ceux du Vél d’Hiv : parce qu’ils étaient juifs. L’antisémitisme n’est pas une opinion, c’est une abjection. Et, pour cela, il doit être d’abord regardé en face, nommé, reconnu pour ce qu’il est et, partout où il se déploie, être démasqué et puni. Toutes les idéologies d’exclusion, toutes les formes d’intolérance, tous les fanatismes, la xénophobie, qui tentent de développer la logique de la haine, trouveront la République sur leur chemin.»

Dans le public qui assistait à cette cérémonie, se trouvait l’assistante sociale qui était allé voir le préfet de Paris pour dénoncer les conditions abominables de détention au Vél d’Hiv, préfet qui l’avait renvoyée sans l’écouter. Et Madeleine Reyman, qui avait 8 ans quand elle avait été arrêtée rue du Temple avec sa mère et enfermée au Vél d’Hiv. Elle se souvient de Lazare et de Régine, des enfants de son âge qui dormaient à côté d’elle, tués alors qu’elle a survécu, et ne peut s’empêcher de pleurer.

Raphaël Esrail, président de l’Union des déportés d’Auschwitz qui, avec d’autres rescapés, s’est battu depuis la Libération pour la vérité, la mémoire, et l’histoire, conclut : «Pour nous, Français, ce lieu du Vél d’Hiv incarne aujourd’hui le génocide.»



23/07/2012
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