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CHRIS MARKER ET CASTORIADIS : leçon de démocratie 1

Chris Marker-Cornelius Castoriadis : une leçon de démocratie

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    C'était en 1989. La Sept (qui deviendra Arte-France) diffuse L'héritage de la chouette, douze films de quelque 25 minutes chacun signés Chris Marker, le réalisateur décédé le 29 juillet dernier. Autour de douze mots (tragédie, philosophie, misogynie, musique, mythologie, mathématique, nostalgie, démocratie, olympisme et… la chouette, symbole d'Athèna, qui fait l'objet d'un film-hommage), Chris Marker s'empare d'une idée de Jean-Claude Carrière et s'attèle à définir l’identité occidentale, tout en s’interrogeant sur les valeurs de la Grèce antique et son héritage à travers les siècles (tous les films sont rassemblés sous l'onglet “Prolonger”).

    Sur des images tournées à Tokyo, à Athènes, autour d'un banquet installé dans un théâtre antique et sur la voix off du comédien André Dussolier, le cinéaste tisse un récit illustrés des interventions érudites des philosophes Cornelius Castoriadis et Michel Serres, des compositeurs Iannis Xenakis et Angélique Ionatos, des réalisateurs Elia Kazan et Theo Angelopoulos, des historiens Giulia Sissa ou Jean-Pierre Vernant...

    L'entretien initial avec Cornelius Castoriadis (1922-1997) a duré pas moins d'une heure un quart. C'est celui-là, en intégralité, que nous vous proposons ci-dessous. Nous avions déjà évoqué l'œuvre prophétique de Castoriadis à propos de l'actuelle crise grecque (c'est ici, sa notice Wikipédia est là et le site de l'Association Castoriadis est là).

    À l'heure où la Grèce du XXIe siècle s'interroge sur le pouvoir de son État, sur la capacité de décision de son peuple, à l'heure où sa politique lui est imposée par d'autres puissances européennes, il est intéressant d'écouter le philosophe parler de la naissance de la démocratie athénienne, de ces cités « où il n'y a pas d'État », de la seule chose que les Grecs ont créé, « la liberté, liberté de penser, liberté d'agir ». De l'écouter dénoncer l'avènement d'une société où la bureaucratie peut dire : « Taisez-vous, vous ne savez pas ! Nous, nous savons que si telle chose est faite, alors telle autre chose doit être faite ». De l'entendre réfléchir ces sociétés qu'il « n’appelle pas démocratiques, mais des oligarchies libérales ».

    Tout en mettant en garde contre les projections et les mauvaises interprétations, cette grande leçon d'histoire antique pourrait, selon les termes de Castoriadis lui-même, « nous inspirer pour essayer de penser autrement notre relation à la loi, notre relation à la collectivité, notre relation au pouvoir ».

    Découvrir cet entretien, c'est évidemment retrouver la vitalité de la pensée de Cornelius Castoriadis, philosophe à l'antique dont la parole nous fait penser. Mais c'est aussi, une semaine après sa disparition, faire écho à l'engagement qui n'a cessé d'inspirer l'œuvre cinématographique de Chris Marker, doublement radicale, dans son invention artistique comme dans son propos intellectuel. Présentant en 2008, sous l'intitulé Le fond de l'air est rouge, le double DVD qui regroupe sa chronique filmée des espérances des années 1960 et 1970 (vous pouvez vous le procurer ici), Marker évoque « l'interminable répétition d'une pièce qui n'a jamais été jouée ». Une pièce dont Castoriadis, sous le regard de Marker, nous dit comment il faudrait, peut-être, un jour, la rejouer.

    (La transcription intégrale de cet entretien se trouve dans les pages suivantes et peut être téléchargée ici, en fichier PDF)



    13/08/2012
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