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1968 à Toulon, parcours..en forme de poème libre

Je suis allée au marché de  Toulon acheter des pivoines blanches pour toi mon amour imaginaire
Je suis allée place de la liberté et j'ai trouvé la liberté en souhaitant qu'elle ne soit pas en danger.
Je suis allée avenue de la république et je me suis souvenue de la grande manifestation de Châteauvallon pour la république
Je suis allée place d'Armes. Il n'y avait plus de kiosques à musique, mais un parking et des armuriers autour de la place d'Armes.
Je suis allée rue des Riaux et je me suis souvenue de la galerie que nous avons créée en 1968/69, sous l'oeil complice des habitants de la basse-ville qui nous encourageaient; en face il y avait un grand local pour tirer des affiches en sérigraphie, c'était aussi un lieu de rencontres. Nous avons eu des entretiens à cette époque avec l'école de Nice, qui avait "fait 68" aussi, et dont certains artistes sont mondialement connus aujourd'hui.J'ai connu la vraie boutique de Ben. Nous avions 17 ans, parfois plus.
Je suis allée rue Victor Clapier et je me suis souvenue de mon enfance, surtout d'une scène où mon père m'avait pris sur ses genoux et me chantait un tas de chansons de Charles Trenet, des chansons de fantaisie et de liberté.
Je suis allée au Jardin de la Ville où je défoulais ma grande énergie et je me suis demandée si, après que j'ai craché sur le pantalon d'un vieux monsieur à lâge de trois ans, on aurait appellé cela de la délinquance...
Je suis allée au Lycée Bonaparte, un lycée qui n'a plus rien à voir avec l'ancien, le mien. A mon époque, la libération a été de ne plus se lever quand le professeur arrivait en classe, de pouvoir porter des pantalons et d'avoir des délégués de classe. Ca n'était pas bien méchant.
Je suis allée au Lycée Dumont d'Urville. Je me suis souvenue de mes amoureux durant ma scolarité. Je me suis surtout souvenue de 1968 qui a surgi en classe de seconde pour moi. J'avais 15 ans, et presque deux ans d'avance. Tous, élèves et profs, avec des assemblées générales que j'ai consignées sur des carnets, nous avons opéré une véritable refonte de l'enseignement. Si ce que nous avions inventé avait été appliqué, l'enseignement aurait été meilleur. Au lieu de quoi on a donné un type d'enseignement, par la suite, assez hétéroclite et pas toujours efficace. Pour le coup c'était de la démocratie participative. On n' imagine pas la richesse des échanges qui sort de ces débats.
Je suis allée faire du porte à porte dans les immeubles du Port marchand près du lycée. Quand on disait que l'on voulait vendre un journal politique, les femmes nous répondaient qu'elles ne faisaient pas de politiques et appellaient leur mari. Parfois c'étaient des ouvriers qui nous envoyaient bouler, étaient racistes et machos. Parfois ils nous écoutaient et étaient d'accord avec nous. Il y avait beaucoup de gens qui se parlaient dans la rue pour dire tout ce qu'ils avaient à dire, tout ce qui les gênaient dans leur vie difficile. Il y avait des femmes seules chez elles qui nous faissaient rentrer et nous parlaient de leurs problèmes. Elles en avaient beaucoup. Les avortements en cachette, la contraception défendue par leurs maris, les violences et la tyrannie de leurs mêmes maris, les difficultés pour élever des enfants seules avec un salaire très bas. Sur Mai 68 j'ai encore beaucoup de choses à dire.Ca a été le début d'une France moderne, le début d'une autre ère, celle qui pouvait aborder le XXI ème siècle. L'ère de la création, de l'imagination, mais aussi d'une refonte des comportements et des valeurs.C'était une période de croissance, de plein emploi, mais nous vivions sous une chape de plomb, la France était triste, les enfants, les ouvriers, les employés, les femmes n'avaient que des devoirs et pas de droits. Et puis soudain l'espoir d'une nouvelle époque de l'histoire est arrivée. Nous étions comme les acteurs de cette histoire, nous réinventions tout et tous avaient la parole. Sauf ce que l'on a appellé "la majorité silencieuse" qui n'était qu'une minorité, à vrai dire, tant elle était inerte et craintive. Puis elle s'est réveillée, il y eu la manif des anti-soixante-huit, des législatives à droite et les accords de Grenelle qui vaient fait rentrer dans le rang des ouvriers devenus incontrôlables..
Mais rien, malgré cela n'a plus jamais été comme avant. Tant de libertés conquises, acquises qu'on ne sait pas qu'elles viennent ...des années soixante-huit.
Et maintenant il faudrait revenir en avant ! Non !
Je suis allée en pleine nuit devant mon ordinateur pour vous dire tout cela.
Et en plongeant dans ma mémoire, je peux dire que jamais je ne déchirerai les pages consacrées à 68, parce qu'elles furent les plus belles années de ma vie, et personne ne pourra me les enlever, surtout pas Mr Sarkozy.
Laulau

PS Si ce blog vous plaît, faites le connaître. 




05/05/2007
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